12 years a slave - Steve McQueen

On peut parfois se demander juste avant l’entame d’un film si l’on va mettre du temps à y entrer, si la mise en place de l’intrigue va s’éterniser. Dans 12 years a slave, on n’a tout simplement pas le temps de tergiverser. Et ce, dès le premier plan, où apparaissent plusieurs rangées d’esclaves, immobiles. Nos yeux sont occupés à les scruter, les analyser. Il nous est impossible de louper une seule miette de leurs attitudes, leurs postures, leurs regards soucieux et craintifs, aussi nombreux soient-ils.  Ainsi commence le troisième film de Steve McQueen.
La particularité du britannique réside dans le choix des thèmes abordés : durs, radicaux. Que ce soit la grève de la faim entamée par Bobby Sands, membre de l’IRA, dans Hunger, ou le sex addict joué par Michael Fassbender dans Shame. Ses films sont puissants et dérangent.  On n’échappe pas à la règle avec 12 years a slave. Plus classique et plus accessible que ses prédécesseurs, 12 years a slave raconte l’histoire de Solomon Northup, afro-américain à l’existence paisible, heureux en famille, libre – et oui, il faut le préciser – talentueux violoniste jouant dans de grandes réceptions, qui se voit un jour kidnappé, drogué et vendu. Rien que ça ! Commence alors un périple de l’horreur. Après s’être fait tabassé pour ne pas vouloir reconnaître être un esclave, on l’embarque dans un bateau : direction les plantations du sud.
Bon nombre de rencontres fera Solomon durant ces longues années. Mais les plus marquantes restent indéniablement les propriétaires de plantation de coton. McQueen ne cherche pas à dénoncer leurs comportements. On le voit à travers son choix judicieux des maîtres (Benedict Cumberbatch vu notamment dans La Taupe de Tomas Alfredson ainsi que Michael Fassbender) aux attitudes totalement opposées. L’un, calme avec un certain respect de l’homme en tant qu’ouvrier, et l’autre atrocement dur n’ayant aucune pitié. Malgré ces deux extrêmes,  Solomon se comportera de la même manière en essayant d’être malin, se rendre utile afin d’obtenir quelques faveurs, aussi maigres soient-elles. Une scène parvient à elle toute seule à capter l’atmosphère terrifiante, terrorisante dans laquelle cohabitent ces esclaves. Solomon se retrouve pendu à une branche d’arbre après une altercation musclée avec un maître sournois interprété par Paul Dano. Seul, attaché avec juste ce qu’il faut comme hauteur pour trouver un appui sur ce sol boueux. En arrière-plan, d’autres esclaves exécutent leurs tâches sans le moindre regard, résignés. Devant lui, la femme du propriétaire, posture droite, imperturbable, l’observe. 
McQueen, à travers l’intégralité de son œuvre, filme la chair sous tous les angles. Qu’elle se décompose, qu’elle se déchiquette, qu’elle se colle, qu’elle se frôle, le britannique filme la souffrance des corps. Il utilise ce procédé pour raconter ses histoires. Malgré la dureté du propos, la brutalité de certaines scènes, ce film est nécessaire, grandiose et à la portée de tous grâce en partie à l’aspect romancé du récit. Cependant, une petite boule s’installe dès le début au beau milieu de votre joli ventre, et croyez-moi, mets quelques temps à disparaître.

Bande annonce (vostfr) :


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